Affiche principale |
Imtiaz Ali
C'est un certain Imtiaz Ali qui réalise le film. Né en 1971 il plusieurs casquettes : scénariste, réalisateur, producteur, acteur ... Comme Shah Rukh Khan, il est musulman, ce qui n'est pas bien vu en Inde ces temps-ci. Sa carrière a commencé à la télévision, avant de passer au grand écran. Son prochain projet est une série télévisée.
Il a réalisé huit films depuis 2005, dont l'excellent Jab we met :
2005 : Socha Na Tha
2007 : Jab We Met
2009 : Love Aaj Kal
2011 : Rockstar
2014 : Highway
2015 : Tamasha
2017 : Jab Harry met Sejal
2020 : Love Aaj Kal 2
Un titre mixte et évocateur
Titre : Jab Harry met Sejal
Traduction : Lorsque Harry rencontra Sejal
Le titre est un mélange d'hindi et d'anglais, avec une claire référence au film Quand Harry rencontre Sally, un hommage qui permet de s'approprier le cinéma mondial (sans que le film ne soit un remake). Le film est produit par Gauri Khan, l'épouse de Shah Rukh Khan.
Langue : hindi
Année : 2017
Durée : 2h24
Un succès relatif, gagné dans le temps
(environ, en raison des arrondis et des taux de change entre roupies, dollars et euros)
A sa sortie le film n'a pas rencontré une forte audience. Mais cinq ans après, la production est plus que rentrée dans ses frais.
Budget : 11 millions euros
Recette : 19 millions euros
Un road-movie européen
En Europe (de l'est surtout), Harry, de son vrai nom Harinder Singh Nehra, est guide touristique indien, quadragénaire un peu sauvage. Harry passe de groupe en groupe, de ville en ville, de femme en femme, sans ancrage.
Et la dernière chose dont il a envie c'est de servir de chaperon à l'une de ses clientes. La jeune Sejal a laissé son groupe prendre l'avion sans elle, afin de revenir dans les lieux du voyage, à la recherche de sa bague de fiançailles égarée quelque part.
Shah Rukh en salarié désabusé |
Deux acteurs en phase
C'est bien là une comédie romantique, il n'y aucun doute, et diablement réussie. Les deux acteurs se retrouvent à nouveau au diapason de ce film qui ne fut ni un blockbuster commercial ni un aboutissement critique.
Après Rab Ne Bana Di Jodi (2008) et Jab Tak Hai Jaan (2012), c'est la troisième collaboration d'Anushka Sharma (née en 1988) et Shah Rukh Khan (né en 1965). La génération d'écart colle au scénario, un homme patiné regarde avec distance et appréhension une jeune femme faire ses premières expériences de l'existence.
Une scène de complicité |
Portrait d'un homme libre
Le personnage est nostalgique d'un amour de jeunesse perdu, à la suite duquel il a quitté son Penjab natal. Le souvenir de sa bien-aimée est traité avec humour et légèreté. Dans sa vie européenne, Harry est un séducteur, un célibataire qui a des aventures, rien de bien répréhensible à nos yeux, mais certainement condamnable aux yeux d'un public indien conservateur, pour qui le mariage reste une institution sacrée et nécessaire. Et l'on peut se demander si son tatouage (de tendance maori ?) n'incarne pas sa revendication de liberté à la fois individuelle et sexuelle.
On aborde également ici la question rarement abordée dans le cinéma bollywood du salariat et des rapports de force qu'il induit. Harry a été licencié à plusieurs reprises, suite à ses aventures avec ses clientes. Il a peur de perdre à nouveau son travail. Et Sejal lui impose sa compagnie et ses exigences, avec le chantage explicite de faire remonter à son employeur la mauvaise volonté dont il fait preuve.
Un Shah Rukh Khan étonnamment tatoué |
Portrait d'une jeune femme pas si libérée
En regard de ce portrait d'homme libre mais triste, la jeune et jolie cliente est une femme sur la brèche. Elle a quitté son fiancé, son groupe et tous les repères réconfortants pour se mettre sous la protection du guide. On sent bien peu à peu que la recherche de la bague perdue n'est qu'un prétexte pour passer plus de temps avec cet homme fascinant. Inconsciente au sens propre et au sens figuré, Sejal est naïve et joue avec le feu par tous les moyens possibles, avec la certitude d'être invincible. Son assurance et son bagage juridique ne la sauveront pas. Le spectateur le sait tout autant que Harry.
Le jeu quelquefois un peu trop expressif d'Anushka Sharma reste un grand plaisir, du cinéma en grand.
La carte de la provocation |
Le tabou du sexe
Il est question de manière directe et à plusieurs reprises dans le film du sexe. Un sujet qui n'est pas discuté habituellement. Le propose est pris avec drôlerie, notamment lorsque Sejal lui fait signer une décharge, dans l'éventualité où ils auraient des rapports sexuels.
A tout moment, l'honneur (comprendre la virginité) de Sejal est protégé : Harry la sauve d'un potentiel viol, leur sommeil partagé reste très vêtu, plusieurs fois, c'est sur le front qu'il l'embrasse, d'une chasteté assez impensable dans nos autres cinémas. Cela n'empêche pas le lien de dégager un érotisme de tous les instants, et tout en retenu, ce que les indiens savent si bien faire.
La sensualité du cinéma bollywood |
Marivaux et les faux semblants
Le jeu du chat et de la souris que mènent Sejal et Harry, malgré un scénario un peu facile, et une histoire un peu mince, débouche sur des sentiments authentiques, malgré les rapports de force, malgré la différence de génération, malgré l'interdit social, malgré la distance... C'est bien à Marivaux que fait penser le film, et la vérité de sentiments authentiques.
A la conquête de l'Europe
Le film n'est pas dépourvu des clichés habituels, et on voit défiler sous nos yeux un rêve d'Europe, dans son côté le plus folklorique et pittoresque. Amsterdam nous vend ses canaux et ses Rembrandt (un exotisme véritable pour le public indien). Le Portugal présente un fado pour le moins improbable : la chanteuse passe de l'hindi, au portugais, pour revenir à l'anglais. A Prague ou Budapest on assiste à une incongrue scène de pole dance.
A coté de ce rêve-là, sont évoqués les clandestins et le spectre de l'immigration illégale.
La diaspora indienne est partout, et partout chez elle. Mais pas forcément à sa place, comme semble le conclure le film (sans dévoiler ici son dénouement).
Bande annonce
18 chansons !
Toutes plus inspirantes les unes que les autres et surtout : une chanson drôle et disco, avec des lumières années 50 : Beech Beech Mein (Entre toi et moi).
A écouter en boucle, en version originale ou en remix de dance-floor.
Commentaires
Enregistrer un commentaire